Nous entrons dans notre troisième lune:

Je suis moi

L’enfant a grandi, elle explore son environnement. Elle marche, cours, saute, grimpe, parle…
L’enfant a des désirs, plus seulement des besoins, il commence à se définir non pas seulement en terme d’opposition (je suis séparé de toi) mais en terme de JE. Qui suis-je? Je commencerai à apprendre cela à travers le regard des autres et l’image qu’ils me renvoient de moi.

Le jeu des miroirs

L’égo, la personnalité, le caractère, se construisent. L’enfant a besoin d’être vu(e), regardé(e) et entendu(e). Il cherche l’image de lui-même dans le miroir-reflet qu’il reçoit des autres. Il-elle est donc très fragile, très sensible à l’approbation de son entourage. C’est « maman, papa, regardez-moi! ». Les regards désapprobateurs, les commentaires dévalorisants,les situations injustes, les mensonges qu’on lui fait, ainsi que les abus et violences sous toutes leurs formes vont avoir un effet désastreux sur cet être en pleine construction.

À l’inverse, un miroir grossissant qui l’exalte, le met au-dessus des autres (tu es le meilleur! la plus gentille! la plus intelligente!…) et ne correspond pas à une réalité relativement juste laissera aussi ses traces en lui conférant une image démesurée de lui-même.

Les miroirs déformants (les pires) seront des miroirs où l’enfant ne sais jamais à quoi s’attendre: il est bon aujourd’hui, mauvais demain. Il se retrouve dans des doubles contraintes, c’est-à-dire des situations ou il n’y a pas d’issue, où, quoiqu’il fasse il est dans l’erreur; dans des situations incongrues où on le laisse faire quelque chose et il est puni ensuite de l’avoir fait . L’enfant ainsi miroité reçoit constamment des messages contradictoires aux conséquences néfastes. Il ne sait plus s’il est aimé ou pas, s’il est bon ou pas, et même ce qui est bon un jour peut devenir mauvais le lendemain sans qu’il puisse comprendre ce qui a changé.

Il n’y a d’ailleurs rien à comprendre puisque les miroirs déformants sont incohérents.

Et cela peut nous rendre fous…

Le pouvoir de la parole

L’enfant de cet âge a un sens aigu de sa parole. Sa parole donné est un contrat. Il s’attend à ce que les adultes fassent ce qu’ils disent et surtout, tiennent leurs promesses. La trahison de la parole donnée le blesse et il vaudrait mieux ne promettre que ce que nous sommes raisonnablement sûrs d’accomplir.

Dis-moi Pourquoi?

C’est aussi un enfant curieux qui va poser mille « pourquoi » par jour, au point de peut-être en exaspérer ses parents.
Pourtant, c’est un moment fertile, un moment d’expansion et d’ouverture à la découverte. Dans le meilleur des mondes elle trouverait des réponses relativement simple (adapté à son âge) même aux questions difficiles: pourquoi le chat est mort? Comment le bébé est rentré dans ton ventre? Où j’étais avant d’être dans ton ventre?…
Il y aurait le souci de l’aider à construire son monde en lui répondant patiemment, honnêtement (je ne sais pas où tu étais avant d’être dans mon ventre, j’ai la croyance que…); en comprenant que, pour l’enfant de cet âge, l’adulte est un Dieu tout-puissant et omniscient. Il est bon alors de montrer que nous ne pouvons pas tout, que parfois nous ne savons pas, que pour certaines choses il n’y a peut-être pas de réponse.

En acceptant de se montrer avec ses failles, l’adulte permet ainsi à l’enfant de ne pas être parfait lui non plus.

L’adulte se doit aussi de nommer les choses qui entoure l’enfant. Et plus les adultes alentour seront patients et répondants plus l’enfant se développera. Ainsi, un parent capable de nommer les émotions que l’enfant ressens (Oh, je t’ai fait peur en entrant brusquement dans ta chambre-devant les yeux écarquillés de l’enfant-, ou bien tu pleures parce que tu as mal parce que tu es tombée; oui, je vois bien que tu es en colère que je te refuse ce bonbon), permet à cet enfant de développer son vocabulaire émotionnel. Et l’enfant évoluera dans un monde qui fait sens pour lui ou elle. Elle pourra développer des chaînes logiques d’actions, de pensées, d’émotions, de compréhension du monde qui l’entoure et des relations entre les choses et les gens.

Son moi construit, non-construit ou mal construit sera le sol sous ses pieds pour sa croissance futur…

Cette troisième lune, qui voit la naissance et la construction du Je, sera l’origine de bien des maux que l’on retrouvera chez les adultes, quand elle est mal développée. Narcissisme, égocentrisme, difficulté d’empathie, perversité, manipulation, objectification de l’autre, relation utilitariste, et bien d’autres, sont les mauvais penchant d’une troisième lune blessée.

Cela devient alors notre responsabilité d’adulte de nous reconstruire pour retrouver un meilleur équilibre, plus de maturité et la possibilité de relations saines, épanouissantes et agrandissantes.

Vous êtes vous déjà posé ces questions ?

Savez-vous différencier vos désirs de vos besoins?
Êtes-vous capable de vous auto-réguler?
Êtes-vous capable de maîtrise de vous-même? (à ne pas confondre avec le contrôle…)
Savez-vous qui vous êtes?
Vous connaissez-vous bien?
Avez-vous de l’amour pour vous-même?
Êtes vous conscient(e) de votre juste valeur? Sans orgueil mal placé, ni fausse modestie?
Osez-vous vous montrer tel(le) que vous êtes?
Êtes-vous patient(e) avec vos apprentissages? Ceux des autres?
Êtes vous assez solide intérieurement pour reconnaître vos erreurs et vos fautes?
Savez-vous vous protéger et sortir de situations malsaines?

Si la réponse est non, c’est la troisième lune dont vous aurez à prendre soin en vous afin de bâtir une personnalité suffisamment forte pour osez prendre des risques et suffisamment aimante pour honorer votre valeur.

Crédit photo: Carole Poirier