Pleine lune du mois

Celle-Qui-Écoute

Écouter, et parfois même finalement entendre. En-tendre.

Entendre l’autre, s’entendre soi-même, bien s’entendre. Tendre vers l’autre, avec tendresse ?

Une grand-mère m’a déjà dit que l’Esprit, dans sa grande sagesse, nous avait donné deux oreilles et qu’une seule bouche pour bien nous montrer ce qui est le plus important.

N’avons pas tous soif de l’oreille de l’Autre? D’être entendu(e) par l’Autre ? D’être «compris» par l’Autre?

Savons-nous écouter ? Savons-nous créer l’espace sacré dans lequel l’autre peut se dire, sans peur, sans reproche, sans jugement, sans interruption du moi-je qui voudrais toujours donner son opinion, son avis, ses conseils ?
Ce moi-je qui guette dans le monologue de l’Autre quand viendra le moment opportun pour reprendre la parole, pour parler encore de lui, d’elle.
Comment cultiver un espace réel où je peux accueillir l’autre dans tout son être?

Une écoute de confessionnal, mais avant les «je vous salut Marie» et sans la punition ou la honte.

Commencez par écouter votre coeur qui bat dans votre poitrine. Au début vous ne l’entendrez pas. C’est comme un bruit de fond, effacé de notre conscience, comme le bruit de la circulation d’une grande ville.
Alors, nous écoutons et puis, entre deux respirations : BOUM BOUM.
C’est la vie qui bat son rythme en moi. Je peux y déposer mes pensées, ma conscience. Celles et ceux  qui pensent avec leur tête gagneraient à penser avec leur coeur.

BOUM BOUM c’est le tambour; les pieds sur le sol qui se déposent ou s’abattent sur notre Terre-Maman.
BOUM BOUM c’est le bruit de toute la création que j’entends depuis que le spermatozoïde de mon père a rencontré l’ovule de ma mère. C’est lui qui m’a formé, informé que la Vie bat. Et parfois se bat.
BOUM BOUM c’est aussi le bruit des canons et des fusils,des bombes et des mines, de la destruction, révélateur du manque d’écoute.
Et comme le tambour, je n’entends pas toujours la musique mais bien l’écho des coups que je reçois… (Jacques Salomé)
Ma propre souffrance me rend sourd(e). C’est pourquoi il est parfois si difficile de s’effacer suffisamment pour écouter l’autre.
Car recevoir l’autre en Soi c’est accepter de ne plus être le centre. C’est se mettre de côté en toute gentillesse envers soi-même, sans se nier ou se nuire. C’est lâcher un instant ce qui nous occupe ou nous préoccupe et tourner notre regard et nos oreilles vers cet(te) autre singularité qui s’adresse à nous. Comme la mère qui se tourne quand son enfant lui dit «regarde-moi, maman».
Pour y arriver, il me faudra d’abord me mettre au service de l’écoute de mon être, de mes besoins, de mes désirs, de mes aspirations, de mes peurs, de mes émotions. Car quand j’ai su créer suffisamment d’espace pour m’entendre moi-même, alors seulement puis-je réellement me mettre à l’écoute véritable de l’autre. Sinon, trop de voix intérieures se bousculent et m’accaparent et ce sont elles que j’entends, croyant écouter l’autre. Ce sont elles qui risquent de voiler et de déformer les propos de l’autre, me faisant entendre parfois bien loin de ce qui a été dit.

BOUM BOUM, qui frappe à la porte de ma vie ? Qui essaye de réveiller ma conscience endormie ? Allo?
J’écoute.
Je finirai bien par entendre. Si je commence par me taire.

crédit photo:Carole Poirier