Nous entrons dans notre cinquième lune:
Je fais partie d’un monde
Cinq ans. Nous nous ouvrons au monde et nous devenons des êtres sociaux. Nous sortons tranquillement du giron maternel, nous agrandissons notre territoire au-delà de la famille et nous sommes prêt(e)s à apprendre les règles qui régissent notre société. Cela peut nous sembler tard, nous qui mettons nos enfants en garderie bien avant qu’ils/elles aient 5 ans!
Pourtant, nos enfants ont besoin d’une assise personnelle et familiale avant d’être confrontés aux « différences ». La stabilité acquise à la maison, auprès des frères et soeurs, de la famille nucléaire et élargie, permet à l’enfant de se sentir solide et confiant(e). Bien que dès 4 ans il/elle puisse apprendre et respecter-en partie du moins- des « règles », de conduite, de jeux, de relations, ce n’est que vers 5 ans que sa maturité émotionnelle lui permet d’apprendre à gérer des conflits, des disputes, des règles nouvelles dans un environnement nouveau. Vers cet âge, l’enfant sort de la petite enfance, et découvre « Le Monde », cette construction humaine et sociale pas toujours en phase avec la Nature ou ses Lois. Les enfants ont tout de même besoin de comprendre comment le naviguer, le comprendre, s’y adapter et aussi, avec le temps, en voir les failles.
Parce qu’elle a pu construire son identité, l’enfant est maintenant prête à laisser la place à l’autre. Elle peut écouter et apprendre de ses pairs; elle peut partager qui elle est; elle peut communiquer ses désirs et faire la différence entre un désir et un besoin.
Parce qu’il a pu recevoir un miroir adéquat, l’enfant est maintenant capable d’une certaine réflexion; il peut comprendre que l »autre » est comme lui-même; l’autre sent et ressent; l’autre lui est semblable et l’enfant peut donc commencer à se mettre à la place d’un autre. Ce sera essentiel au développement de son empathie.
La curiosité des enfants de cet âge est immense et le monde est à découvrir!
Le pouvoir des adultes de son entourage est encore grand et son entrée dans le monde se fait rarement sans heurt. Car maintenant que l’enfant a plus conscience de l’autre il/elle devient plus conscient(e) de soi et de l’image qu’il/elle projette.
C’est le moment où nous sommes comparés aux autres et, malheureusement, c’est rarement juste ou bienveillant. Si nous n’avons pas appris tout à fait les mêmes choses que nos camarades nous pouvons entrer en contact avec une nouvelle émotion: la honte. Ce sera notre première confrontation avec les différences. Différences culturelles, cultuelles, éducationnelles, sociales.
Nous voulons nous sentir accepté(e)s dans cette société qui sera le tissu de notre vie future. Nous avons besoin de sentir que nous y avons notre place. Comme le lionceau qui fait le tour de sa troupe, le jeune singe qui va rencontrer les autres mâles et femelles du groupe, le poussin qui s’éloigne de sa mère pour explorer le monde; nous sommes désireux.ses d’être accepté.es et craintif.ves du rejet. La tribu c’est notre survie et, de tout temps, le rejet et l’exil étaient la pire punition que l’on pouvait infliger à un être.
Crédit photo: Carole Poirier
Les premières blessures
Être humilié(e), tourné(e) en ridicule, pointé(e) du doigt est une blessure profonde à cet âge. Blessure que nous transporterons dans nos relations sociales ensuite sous formes de problèmes relationnels, de difficulté en entrer en contact, à se faire des ami(e)s, à les garder; à suivre des règles de conduite; à s’intégrer dans un groupe de travail par exemple.
C’est vers cet âge que nous apprenons à mentir et que nous commençons à comprendre que nous pouvons dissimuler des choses à nos parents; qu’il est possible que nos parents ne soient pas des Dieux tout-puissants et omniscients. Ils ne savent pas ce qui s’est passé à l’extérieur de la maison si nous ne le racontons pas. Ils peuvent parfois deviner qu’il s’est passé quelque chose mais pas toujours.
Ainsi l’enfant peut garder par devers lui/elle, ses pensées et ses actes. L’enfant commencera alors ses premières armes de « manipulation »: le charme, la bouderie, le rejet, la colère, la dissimulation ou le mensonge pour obtenir ce qu’il/elle veux.(Il ne faudrait pas que cela fonctionne trop bien…car ces méthodes pourraient s’installer profondément…).
L’enfant apprend aussi qu’on peut ne pas le croire quand il raconte quelque chose, ce qui est aussi un choc. Il ne comprend pas qu’on puisse ne pas croire ce qu’il/elle sait être vrai. Cela va affecter sa façon de faire et de se faire confiance. Si je peux mentir, si je peux être cru.e quand je ment, ou ne pas être cru.e quand je dis la vérité; si l’autre peut mentir sans que je le sache… Que Croire? Qui Croire? En quoi, en qui, puis-je continuer à faire confiance?
Il est désastreux pour l’enfant de cet âge que les adultes lui mentent. Les adultes devraient « nommer la réalité » plutôt que de mentir. Par exemple, il vaut mieux dire à l’enfant « je pleure car il m’arrive à moi-aussi d’avoir de la peine, mais ne t’inquiètes pas » ou « oui, tu entends que ton papa et moi sommes fâchés/avons des difficultés/parlons fort mais c’est une conversation entre adulte et nous trouverons une solution » ou « oui, je vis des inquiétudes mais ce sont des inquiétude de grandes personnes et tu n’as pas en t’en préoccuper » ou « je ne veux pas répondre à cette question maintenant car je considère que tu es un peu jeune encore pour la réponse/ou bien, c’est intime, personnelle ou pour les grands ». Car lui mentir ou dire des bêtises sous prétexte que c’est un enfant le rendra confus et méfiant et il vivra un choc plus grand d’apprendre la vérité plus tard que d’avoir une vérité à sa hauteur d’enfant.
Je me souviens d’un client qui me racontais que, quand son fils lui a demandé ce qu’il buvait ce matin là, il lui a répondu: « quelque chose dégueu. Il buvait du café et ne voulais pas avoir à dire à son fils que lui ne pourrait pas en boire; il a préféré un raccourcit. Je lui ai demandé s’il avait pensé à l’impact que cela pouvait avoir sur son fils et comment son image de père s’en trouverait affecté. Mon père boit des choses « dégueu »? Pourquoi? Est-ce que je vais avoir à boire des choses « dégueu » moi aussi quand je serai grand? Est-ce que tous les adultes boivent des choses « dégueu »?
Il eut été plus simple et plus juste de répondre « ça s’appelle du café et c’est une boisson pour les adultes; quand tu seras plus grand je t’y ferai goûter ».
Même sur ce qui concerne nos croyances nous pouvons permettre à nos enfants de se faire une opinion. Nous pouvons dire, j’ai la croyance qu’après la mort une partie de nous va au paradis/se réincarne/retourne dans la nature etc…Dans d’autres familles/cultures/religions il y a d’autres croyances.
La lune des relations
C’est une lune importante que cette 5ième; lune des relations; lune de la socialisation; lune de l’appartenance au groupe…
Un beau terrain de jeu pour ce mois-ci! Surtout quand on regarde ce qui arrive à notre société en ce moment même. Le tissu social, déjà fragile, a été très malmené ces trois dernières années. Le stress individuel augmente et le civisme est mis à dure épreuve. Nous ressemblons à ces sociétés en déclin. Il semblerait que le capitalisme ait fait son temps. Notre « monde » est en transition. Par quoi le remplacerons-nous? Car il nous appartient de faire en sorte que le Monde que nous habitons soit le reflet du meilleur de notre humanité.